«Les écrans, je gère» de Niels Weber
Le psychologue et psychothérapeute Niels Weber a publié Les écrans, je gère! chez Magenta éditions. C’est un joli bouquin illustré destiné aux ados.
L’accroche de la quatrième page de couverture:
Si tu en as marre de te disputer avec tes parents parce que tu es plongé[·e] dans ton smartphone… alors ce livre est fait pour toi!
C’est ce que j’ai lu de mieux pour vulgariser le sujet qui intéresse tant de parents. Je n’hésite pas à le conseiller quand une question m’est posée. Surtout si elle porte sur le nombre d’heures d’écran à accorder à ses enfants…
Les faux problèmes
Autant aller tout de suite à l’essentiel et vous donner 2 affirmations de l’auteur:
- il est faux de parler d’addiction aux écrans
- le temps passé devant les écrans n’est pas un problème
Soit vous décidez que Niels Weber a tort, vous arrêtez la lecture de cette page ici, vous ne lirez pas le livre et vous continuerez à proclamer vos vérités. Comme Robert Bidochon, vous êtes «spécialiste sur le tas» et surtout «spécialisé en tout».
Soit ces deux affirmations vous intéressent, vous titillent ou vous interpellent et vous continuez la lecture de cette page (ou vous commandez immédiatement l’ouvrage).
La plus grande partie du livre est explicative. Elle est très bien vulgarisée et agréable à lire. Les chapitres 1 à 5 parlent des écrans qui énervent les parents, de l’attention captée, des risques, des réseaux sociaux et des jeux vidéos. À plusieurs reprises, les ados sont appelés à s’exprimer dans des petites zones lignées.
C’est un plaisir de lire un livre qui ne prend pas les jeunes pour des idiot·es, qui n’assène pas, qui donne simplement des outils pour la vie de tous les jours. Les faux problèmes, nombreux, sont désamorcés et expliqués par un professionnel compétent qui aime le numérique.
Et les vrais soucis
Au chapitre 6, on en arrive aux vrais problèmes. C’est succinct, c’est clair et on aborde ces questions fondamentales avec toutes les explications des pages précédentes.
Niels Weber nous parle de code de conduite, de harcèlement, de droit à l’image, de marketing, de fake news et d’écologie.
Ce chapitre est court parce que les enjeux ont été posés dans le calme précédemment. Les ados sont capables de les comprendre et d’y réfléchir parce que tous les outils sont en leur possession. Pas besoin d’en faire plus.
Pour les ados, vraiment?
Je souris à la lecture du dernier chapitre, qui est un envoi. J’imagine les parents qui ont offert le livre à leurs enfants, sans l’avoir lu, le posant sur la table de chevet avec une phrase sentencieuse du genre:
Tiens, lis ceci, tu apprendras à passer moins de temps sur ton téléphone!
Non seulement les pratiques de leurs ados les énerveront toujours autant, mais il faudra composer avec des jeunes qui en savent désormais plus qu’eux sur le sujet qui fâche. Lorsque les enfants donneront le livre à une des générations précédentes en les invitant à le lire, il sera bien difficile de se défausser.
Alors la vraie aventure va commencer: celle des discussions en famille. Dans une adresse aux parents, en quelques pages, l’auteur esquisse des pistes pour relever le défi. Un ouvrage aussi pour les adultes, définitivement.
Théologie et vie ecclésiale
Les Églises et institutions para-ecclésiales sont très embêtées depuis des années par le web, les réseaux sociaux et les écrans. Elles tiennent facilement 2 discours contradictions:
- d’une part Internet, puis les écrans, sont le mal absolu, qui brisent les vrais liens communautaires (complètement idéalisés)
- d’autre part il est évident qu’il y a derrière les écrans un potentiel de transmission magnifique
Diane Friedli a clairement montré ce paradoxe dans son remarquable billet Les jeunes comme alibi. L’entrée en matière est complètement ratée; elle brise toute relation en niant ce que vivent les ados. Puis la «réponse» incite les adolescent·e·s à… installer une application!
J’ai toujours observé que toutes les communautés dites «virtuelles» finissaient par se rencontrer «en vrai». Ces deux opposés sont entre guillemets, tant je pense cette distinction absurde. Il y a souvent bien plus de vrai dans une lecture de qualité sur le web que dans un small talk du quotidien.
Quelques pistes:
- écoutez Éloïse Deuker, pasteure nouvelle génération puis consultez son compte Instagram @eloise_pasteure
- lisez Je cherche Dieu de l’infatiguable Marc Pernot
- retrouvez des prédications en ligne
Tout à coup, vous avez oublié que vous êtes derrière votre écran depuis plusieurs heures. Soudainement, le temps ne compte plus.
Pour aller plus loin
Si vous préférez du temps d’écran à un livre, je vous invite à suivre les liens de la page Médias et publications de Niels Weber. Vous y trouverez des articles, des audios et des vidéos. Comme le contenu (de qualité) compte plus que le média, vous saurez faire la part des choses. Comme les adolescent·e·s que vous n’êtes peut-être déjà plus, vous êtes des personnes intelligentes.
Je signale aussi le livre Les enfants et les écrans publié chez Retz par Anne Cordier et Séverine Erhel.
À coup d’études sérieuses et documentées, des spécialistes décortiquent les slogans affirmations entendues ça et là sur le sujet.
La thématique est suffisamment importante pour prendre le temps de lire des ressources sérieuses.
En tant que crétin digital numérique, c’est en tout cas mon espoir.